La Course en tête : la solitude du champion selon Joël Santoni
En 1974, Joël Santoni filme le champion cycliste belge Eddy Merckx au sommet de son règne sur le cyclisme mondial dans La Course en tête. Plus qu’un documentaire sportif, le film — présenté à Cannes Classics dans sa version restaurée — est une plongée introspective dans la solitude du champion.
Décédé en 2018, Joël Santoni a laissé derrière lui une œuvre discrète, dont La Course en tête constitue l’un des sommets : un documentaire à la croisée du sport et de la tragédie, qui s’impose comme une véritable méditation cinématographique sur l’effort, la douleur, l’obsession de la victoire et la solitude du héros.
Sorti en 1974, La Course en tête suit Eddy Merckx, considéré comme le plus grand coureur cycliste de tous les temps, à l’apogée de sa carrière. Tourné sans commentaire explicatif ni voix off, le film montre le champion belge sur les routes, à l’entraînement, dans les hôtels, sur les podiums ou encore dans les douches. La caméra s’attarde sur les gestes, les souffles, les regards, les silences — et la musique classique, omniprésente, transforme les séquences de course en un ballet sacrificiel.
Dans le sillage du champion, c’est tout un peloton de figures anonymes que Santoni honore : ces coureurs de l’ombre, coéquipiers dévoués ou adversaires distanciés, sans lesquels la légende de Merckx, surnommé “le cannibale” aurait été tout autre. À travers ce documentaire aux plans épurés et au montage contemplatif, Joël Santoni réinvente la figure du champion en héros mélancolique, solitaire et mythologique.