Un amour derrière les barbelés : Sterne de Konrad Wolf renaît à Cannes

Cannes Classics célèbre le centenaire de la naissance de Konrad Wolf en projetant la version restaurée de Sterne, le chef-d’œuvre en noir et blanc qui a rendu célèbre ce cinéaste allemand engagé. Au travers d’une histoire d’amour au cœur de l’Holocauste, le réalisateur capte avec retenue la résistance de l’humanité face à l’absurdité du mal.

Réalisateur emblématique de l’ex-République Démocratique Allemande (RDA), Konrad Wolf a consacré l’essentiel de sa filmographie à l’exploration des blessures du XXe siècle en défiant la censure officielle avec une sensibilité humaniste et un antinazisme assumé. Élevé à Moscou après la fuite de sa famille de l’Allemagne nazie, le cinéaste témoigna en 1959 de son engagement artistique et politique sans faille avec Sterne (Stars), l’un des premiers films du 7e Art à affronter frontalement la culpabilité allemande face à l’Holocauste.

Inspiré des souvenirs du scénariste bulgare Angel Wagenstein, Sterne raconte l’histoire d’amour tragique, en 1943, entre Ruth (Sascha Kruscharska), une enseignante juive grecque emprisonnée, et Walter (Jürgen Frohriep), un sergent allemand posté dans un camp de transit en Bulgarie. Derrière les barbelés, une fragile complicité naît entre eux, faite d’espoirs contrariés et de rêves brisés par la machine nazie. En mettant en scène l’histoire de cette brève liaison née au sein d’un camp avant la déportation vers Auschwitz, Konrad Wolf rappelle avec sensibilité que l’amour, même éphémère, demeure un acte de résistance face à l’indicible.

À sa sortie, Sterne valu à Konrad Wolf de remporter le Prix spécial du Jury au Festival de Cannes et de se construire une renommée internationale. Choisissant une approche intime plutôt que spectaculaire, où chaque geste et chaque regard pèse lourd de non-dits, il signe un film essentiel sur le pouvoir subversif de l’Homme et rappelle la force du cinéma face aux tragédies de l’Histoire.